Islam et état : quelles (re)compositions politiques ?
Date et heure : Vendredi 9 mai 2025, 10h30 (Heure de Rabat)
Lieu : Centre Jacques Berque (présentiel et distanciel)
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Titre de l’intervention : Les enjeux de la sécularisation du politique au Maroc
Par Mohamed Tozy, Professeur à Sciences Po Aix-en-Provence.
Résumé de l’intervention :
Dans la plupart des pays musulmans, l’islamisation des sociétés a été au départ une affaire d’Etats. Ceux-ci ont très tôt commencé par utiliser toutes les opportunités offertes par la religion pour consolider l’option autoritaire. Les politiques publiques religieuses de pays a priori construit sur des idéologies séculières qui fondent le projet d’un Etat-nation, comme l’Egypte, le Pakistan, l’Algérie, la Turquie et le Maroc présentent de profondes similitudes : monopole de la production d’une orthodoxie et depuis peu une orthopraxie religieuse, contrôle de la formation des clercs religieux et islamisation du référentiel politique.
Le développement des mouvements islamistes dans les années quatre-vingt a obligé ces Etats nations à surenchérir sur les fondements théologiques de leur légitimité et à privilégier l’option la plus conservatrice de l’héritage politique, celle qui sacralise l’autorité en associant la nécessité de l’ordre à la nécessité de la religion. Cette instrumentalisation d’une lecture idéologique de l’islam, les amènent à gouverner par et au nom de la religion. Les modalités de déploiement de cette option différent d’un pays à un autre mais elles ont toutes pour postulat la question de la nécessité théologique du pouvoir et mobilisent le crédo « le désordre est pire que le meurtre ». (al fitna achadou mina al qatl).
Au Maroc, la constitution, adoptée par référendum en juillet 2011, a reconduit les principaux marqueurs religieux du système en dépit du contexte politique qui l’a fait naître, marqué par le « Printemps arabe » et par une mobilisation inédite autour de la revendication d’un Etat civile et une monarchie parlementaire.
civile et une monarchie parlementaire.
Désormais, la constitution institutionnalise ce monopole. Le statut ambigu de « commandeur des croyants » – totalement inventée sous le règne d’Hassan II comme une expression d’une tradition séculaire – est devenu par la force du texte le seul pouvoir dont le Roi dispose en dehors de toutes les relations avec les autres institutions constitutionnelles (article 41 de la constitution de 2011[1]). Cette réforme qui prétendait limiter drastiquement les compétences politiques et législatives du Roi et consolider la hiérarchie des normes en levant toute ambigüité sur le principe de suprématie constitutionnelle et sur la soumission des édits royaux au contrôle de légalité ouvre de larges pans au pouvoir royal dans le domaine, notamment une institutionnalisation d’un Islam d’Etat servi par une bureaucratie sous contrôle.
[1] L’article 41 stipule : « Le Roi, amir al mouminine, veille au respect de l’Islam, il est la garant du libre exercice des cultes. Il préside le Conseil supérieur des oulémas, chargé de l’étude des questions qui lui soumet. Le conseil est la seule instance habilitée à prononcer les consultations religieuses (fatwas) devant être officiellement agréés sur les questions dont il est saisi et ce, sur la base des préceptes et desseins tolérants de l’islam. Les attributions, la composition et les modalités de fonctionnement du conseil sont fixées par dahir. Le Roi exerce par dahir les prérogatives religieuses inhérentes à l’institution d’imarat al mouminine qui lui sont conférées de manière exclusive par le présent article ».
Titre de l’intervention : Scholarly Research on Official Islam in Morocco Post-2003 : A Critical Review and Analysis
Par Salim Hmimnat, Enseignant-chercheur en Science Politique, Université Mohammed V – Rabat.
Résumé de l’intervention : Official Islam, broadly defined as the institutional forms and expressions of Islam regulated by state authorities, has garnered significant scholarly attention and debate over the last two decades. In the case of Morocco, much scholarship has centered on exploring the major structural reforms and initiatives undertaken by the state, in the wake of the 2003 Casablanca attacks, to reshape and overhaul the bureaucratic institutions of governance, agents of religious authority, and the ideological themes and narratives representing Moroccan Islam. The existing research has also extended to the strategic goals and policy agendas driving the increasing influence and resonance of Moroccan Islam, both nationally and at transnational level. Drawing on insights from two decades of scholarly literature on the issue, this presentation seeks to provide an overview and critical analysis of the key themes, methodological orientations, and explanatory perspectives underlying the relevant body of literature. In contrast, it will identify some research directions and knowledge gaps that warrant further scrutiny and field investigation in this area of inquiry.
Coordination : Anouk Cohen (CNRS, CJB), Farid El Asri (IUR), Seydi Diamil Niane (IFAN/UCAD), Youssouf Sangaré (Inalco).
Institutions partenaires : IFAN/UCAD, INALCO, CJB.