Par Daniele Paolini,
Université de Pérouse / Université de Leiden

Écrire la « femme travailleuse » au Maroc : travail féminin et question syndicale dans la revue L’Avant-Garde (1955-1962)

Écrit dans le cadre d’une recherche doctorale qui porte sur l’histoire du syndicalisme marocain, cet article vise à examiner les débats et les problématiques liés au travail féminin au Maroc au cours des premières années de l’indépendance. La période examinée s’étend de la création de l’Union marocaine du travail (U.M.T.), premier syndicat marocain établi officiellement en 1955, à la fondation de l’Union progressiste des femmes marocaines (U.P.F.M.), branche féminine de l’U.M.T. et première organisation de défense des droits des femmes travailleuses au Maroc, en 1962.

L’émergence du syndicalisme au Maroc remonte aux premières décennies de l’occupation française. Le mouvement ouvrier marocain se développa sous la contrainte de la loi coloniale, qui interdisait toute activité syndicale pour les travailleurs marocains, et parmi les rangs des communistes français de la Confédération générale du travail (C.G.T.), qui créa une Union départementale de la centrale métropolitaine à Casablanca en 1930[1]. Ce n’est qu’après la fin de la Seconde Guerre mondiale que les syndicalistes marocains s’imposèrent comme l’une des principales composantes du mouvement de libération nationale, jouant un rôle social et politique majeur tant dans les années du protectorat que dans la phase qui a suivi l’indépendance du pays en 1956. Au-delà de l’hégémonisme du parti de l’Istiqlal, le parti de l’indépendance, le mouvement national marocain se présentait d’ailleurs comme un « mouvement unitaire » qui englobait « toutes les organisations tendues vers le même objectif », notamment la conquête de l’indépendance et le retour du sultan de l’exil[2]. Néanmoins, après le retour du souverain et le départ du colonisateur, le système politique marocain fut marqué par une nouvelle « course pour le pouvoir » où « les alliés contre l’occupant se transforment en concurrents »[3]. Cette nouvelle lutte pour le leadership opposait le Palais royal, avec le roi Mohammed Ben Youssef succédé par son fils Moulay Hassan en 1961, et les représentants du mouvement national. À cet égard, les études sur les clivages sociaux et politiques du Maroc indépendant ont accordé un intérêt particulier au face-à-face entre la monarchie et les partis politiques, avec l’Istiqlal et l’aile gauche du parti, organisé en 1959 autour de l’Union nationale des forces populaires (U.N.F.P.), au cœur de la lutte pour l’acquisition du pouvoir[4].

Néanmoins, les études consacrées à la condition ouvrière et aux transformations du champ syndical au Maroc demeurent rares. De manière générale, les études sur le syndicalisme dans les pays du Maghreb se sont principalement concentrées sur la Tunisie. L’Union générale tunisienne du travail (U.G.T.T.), établie formellement en 1946, a traditionnellement joué un rôle critique dans la vie politique et économique du pays, tant durant la période coloniale qu’après l’indépendance, quand la centrale perdit progressivement son autonomie vis-à-vis le pouvoir politique, en devenant de facto le bras syndical du parti Neo Destour. En vue de l’importance politique du syndicat tunisien, la recherche sur l’histoire de l’U.G.T.T. a souvent impliqué un nombre important d’auteurs tunisiens contribuant, en particulier à partir des années 1970, à un corpus substantiel d’historiographie nationaliste traitant des questions liées au travail et aux mouvements des ouvriers en Tunisie[5]. L’importance de l’U.G.T.T. continue de susciter un intérêt considérable pour le syndicalisme tunisien, en suscitant pas seulement des débats historiographiques féconds, mais aussi l’élaboration d’études issues de la sociologie des organisations et de l’action collective[6].

En ce qui concerne les études sur l’histoire syndicale du Maroc, elles portent presque exclusivement sur la période coloniale, en insistant sur les relations ambiguës entre militants marocains et syndicalistes français et sur le soutien apporté par les ouvriers marocains au mouvement nationaliste contre le régime du protectorat[7]. Par ailleurs, beaucoup moins d’attention a été prêtée aux transformations du champ syndical après l’indépendance du Maroc et aux défis que les syndicalistes marocains ont affrontés par rapport le Palais royale et les partis politiques[8]. Également, l’histoire du travail et des conditions de vie des travailleurs et travailleuses marocains reste un sujet encore trop peu exploré. Alors même que les Marocains virent leurs relations sociales et leurs conditions de travail se désintégrer pendant toute la période coloniale, ils ne trouveraient pas de meilleures conditions matérielles avec la fin du protectorat. Après l’indépendance, c’était une politique d’oppression et de privation avant tout économique qui limitait les opportunités de mobilité sociale et qui innerva les mouvements sociaux marocains, structurés autour des exigences matérielles de la population comme la précarité, l’indemnisation du chômage, la baisse de niveau de vie et un régime qui allait peu à peu renforcer une répression massive des oppositions[9].

Un autre point faible de la littérature existante concerne le manque d’intérêt envers les clivages de genre, qui ne peuvent pas être dissociés des relations de classe et des autres rapports de pouvoir qui ont marqué l’histoire du travail au Maroc. Si l’histoire des femmes au Maroc a été longtemps ignorée, l’engagement féminin a été reconnu comme partie intégrante de la lutte pour l’indépendance. Après avoir combattu aux côtés des hommes, les femmes marocaines étaient toujours actives dans les espaces privés et publics, en militant dans les partis politiques et en contribuant également de manière importante à l’activisme de la société civile et à leur propre émancipation culturelle et sociale[10]. Depuis sa fondation, et plus encore après l’indépendance formelle du pays proclamée le 2 mars 1956, l’U.M.T. a été longtemps dominée par un leadership uniquement masculin dont l’histoire émerge clairement dans nombre de sources écrites, telles que les correspondances et les autres documents d’archives. Toutefois, les travailleuses marocaines étaient fortement présentes dans les activités économiques du pays déjà depuis la période du protectorat, et bien qu’elles fussent exclues de positions de premier plan au sein du syndicat, un nombre considérable de femmes syndicalisées ont milité parmi les rangs de l’U.M.T. dès le début. Des nouvelles études sur l’histoire du mouvement des femmes au Maroc ont aussi montré comme la question ouvrière était au cœur de la mobilisation féminine et tout à fait centrale à la naissance des premiers mouvements féministes marocains[11]. L’importance de la mobilisation féminine, et féministes, au sein des syndicats au Maghreb a aussi été récemment mise en évidence par une étude sur les femmes syndicalistes de l’U.G.T.T. qui, contribuant à la déjà vaste littérature sur le syndicalisme tunisien, met en lumière l’histoire croisée entre syndicalisme et féminismes dans la Tunisie indépendante[12].

Dans la tentative de remettre au centre le rôle des femmes marocaines en tant qu’actrices à part entière de l’histoire syndicale du pays, cet article analyse les principales revendications des femmes travailleuses et les débats autour du travail féminin, tels qu’ils ressortent des pages de l’organe officiel de l’U.M.T. L’Avant-Garde, hebdomadaire créé en 1959 par des membres du bureau national du syndicat comme version en langue française de al-Taliʿa, premier périodique de l’U.M.T. en arabe publié à partir du 1 mai 1956[13]. En examinant l’expérience complexe et intersectionnelle des femmes travailleuses, l’article vise également à identifier les problématiques spécifiques liées au genre qui ont poussé un groupe important de femmes syndicalistes à créer l’U.P.F.M. en 1962.

En ce qui concerne L’Avant-Garde, on focalisera notre attention sur « Les femmes au travail », une section de cette revue rebaptisée « L’Union progressiste des femmes marocaines » en 1962, dédiée exclusivement aux clivages de genre et au travail des femmes. Cette « rubrique féminine » fut publiée uniquement entre 1961 et 1962. Les articles publiés dans L’Avant-Garde n’étaient presque jamais signés. Cette politique de l’anonymat, qui remonte à la création du journal et qui était généralement de mise pour ne pas exposer les auteurs à la répression, concernait également les articles publiés sur « Les femmes au travail » et « L’Union progressiste des femmes marocaines ». En s’adressant aussi bien à ses lecteurs qu’à ses lectrices, cette section féminine de la revue accueillait régulièrement des débats sur des sujets d’actualité, publiait des lettres et des témoignages liés aux problèmes des femmes au travail, mais aussi des entretiens qui permettaient aux travailleuses de s’exprimer directement. De plus, cette section comprenait des articles portant sur les grands défis politiques de l’époque où les enjeux sociaux liés aux aspirations des femmes et de toute la classe ouvrière marocaine.

Femmes marocaines, activités économique et marché du travail 

Dans les années qui ont suivi l’indépendance, les femmes marocaines travaillaient dans des domaines divers: de l’industrie alimentaire aux services postaux, de l’industrie textile à la santé publique, sans compter celles qui étaient occupées dans les tâches ménagères. La femme travailleuse vivait dans une situation générale de pauvreté profonde ou, encore, dans une situation de précarité qui était de quelque manière liée aussi à la situation de son mari, souvent au chômage ou malade et donc incapable de travailler. Souvent obligées d’accepter des conditions de travail mauvaises, voire dégradantes, les femmes se dédiaient également au travail familial et prenaient soin de leur famille[14]. Surtout dans les contextes urbains, la discrimination de genre prenait souvent la forme « d’une ségrégation, avec une concentration des femmes dans des emplois peu rémunérés, non qualifiés, et des écarts de salaire défavorables »[15].

En ce qui concerne la représentation des femmes au sein du syndicat, dans les premières années d’existence de al-Taliʿa et L’Avant-Garde, il y avait seulement quelques informations sporadiques sur le travail féminin et les problèmes des femmes travailleuses. Cependant, la participation de la femme marocaine dans la « lutte armée » menée contre le colonisateur fut reconnue dès le début comme une ressource fondamentale du combat pour la reconnaissance de l’indépendance et de l’unité du Maroc[16]. Avec l’introduction de la rubrique « Les femmes au travail » en juin 1961, les articles et les témoignages publiés ont commencé à élaborer une image précise de la figure de la « femme travailleuse » et du rôle que la femme marocaine aurait dû jouer dans le nouvel état indépendant. La « femme travailleuse » est considérée comme partie intégrante de la classe ouvrière marocaine, elle se doit de mobiliser ses compétences et ses énergies pour participer à la lutte commune de l’ensemble du peuple marocain[17]. Il s’agit également pour elle de poursuivre et de parfaire, aux côtés des hommes travailleurs, la construction du nouvel état-nation. Ainsi, la libération de la femme des activités exclusivement ménagères et son intégration dans le travail professionnel acquièrent un caractère fortement anticolonial, puisque c’est dans le même protectorat français que sont identifiés les fondement socio-économiques et juridiques des inégalités entre les genres dans le marché du travail. Le discours sur l’émancipation des femmes s’enchaîne alors avec celui du nationalisme et c’est ainsi que la participation des femmes à la vie économique devient une condition cruciale pour la libération de la société marocaine. L’émancipation de la femme et la libération de la classe ouvrière, au sein de son organisation syndicale, de toutes les forces impérialistes et féodales sont donc intrinsèquement liées et ne peuvent se réaliser que par la participation complète des femmes à la vie économique du pays[18].

Dans les premières années de l’indépendance, la lutte des femmes travailleuses visait principalement des objectifs spécifiques liés à leur condition féminine. Par ailleurs, les revendications de nature socio-économique, en faveur d’une meilleure législation du travail, s’entremêlaient souvent avec des revendications de caractère politique, visant à exercer des pressions sur les gouvernements et les institutions publiques. Au niveau des luttes qui concernaient leurs travaux, les revendications des femmes tournaient autour de trois grands problèmes. Tout d’abord, il y avait la « question salariale » et l’abolition des « salaires féminins ». Pour promouvoir l’équité salariale, les femmes travailleuses demandaient le respect du principe « salaire égal pour un travail égal » et exigeaient que les employeurs leur garantissent la même rémunération prévue pour les travailleurs hommes[19]. Abdelkader Berrada, chargé d’études à la Caisse de dépôt et de gestion de Rabat, souligna dans une enquête publiée dans le Bulletin économique et social du Maroc[20] que la politique de bas salaires au Maroc et l’exploitation conséquente de la main-d’œuvre locale « furent jetées et développées pendant la période du Protectorat »[21]. Toutefois, écrit Berrada, la politique de bas salaires « a survécu à la domination coloniale » en devenant « la condition sine qua non d’un processus de croissance continue et rapide » dans le Maroc indépendant[22]. Par ailleurs, une loi édictée le 16 mai 1944, en vigueur jusqu’en 1971, stipulait en effet que le taux du salaire minimum légal des travailleuses était égal aux 6èmes du taux applicable aux hommes du même âge et pour un même emploi[23]. Les « salaires féminins », légaux et codifiés, justifiaient une discrimination salariale qui était reliée à un niveau inférieur de qualification professionnelle des femmes, offrant ainsi aux employeurs un soutien légal pour les exploiter comme main-d’œuvre sous-payée. Cela était particulièrement évident dans l’industrie alimentaire, où les femmes représentaient une main-d’œuvre essentielle dans de nombreuses stations d’emballage de primeurs, notamment dans les villes de Casablanca, Larache, Meknès, Agadir et Ouara. Ici, les travailleuses triaient et emballaient des fruits et des légumes destinés à l’exportation et à la vente à l’intérieur du pays, travaillant jusqu’à 13 heures par jour et même 70 heures par semaine. Le salaire horaire était de 77 francs pour une femme au triage et de 90 francs pour celles travaillant à l’emballage, tandis qu’un homme effectuant les mêmes tâches était payé 94 francs l’heure. De plus, ces emplois saisonniers, qui s’appuyaient sur le travail des femmes seulement du mois de novembre jusqu’à mai, faisaient en sorte que les femmes fussent condamnées à un chômage complet pendant tout le reste de l’année[24].

Une situation similaire était vécue par les sardinières de Safi, qui ont été parmi les premières femmes marocaines à travailler en usine. Leurs salaires et conditions de travail étaient parmi les plus précaires du Maroc. Les usines de sardines à Safi employaient 15000 femmes travaillant jusqu’à 10 heures par jour, coupant les têtes de poissons pour environ 20 – 30 tonnes de poisson par jour, souvent sans pause déjeuner. Les « salaires féminins » s’appliquaient également aux sardinières, avec des salaires qui étaient jusqu’à 5/6 fois inférieurs à ceux des hommes. Comme les travailleuses des primeurs, les sardinières étaient employées de manière saisonnière pendant environ six mois, condamnées donc au chômage le reste de l’année. Par ailleurs, les employeurs des usines de Safi exploitaient aussi des jeunes filles de 15-16 ans et même des enfants de 9-10 ans, dont les salaires étaient toujours les plus bas[25].

Cependant, les femmes soumises aux conditions de travail les plus injustes, tant au niveau des salaires que de la protection sociale, étaient les femmes de ménage. Dans la ville de Casablanca, les travailleuses domestiques constituaient plus de 30% de l’ensemble des femmes travailleuses en 1961[26]. Souvent les plus pauvres et sans aucune qualification professionnelle ou éducation, elles étaient les plus exploitées, car aucune législation ne régissait leur profession, permettant ainsi toute sorte d’abus et de violences. En raison de ce vide législatif, les travailleuses domestiques se trouvaient dans une situation encore plus discriminatoire que celles rémunérées selon les « salaires féminins ». La plupart du temps, elles n’étaient même pas payées du tout, mais simplement nourries et logées. Depuis 1955, peu de temps après la création de l’U.M.T., les femmes de ménage se regroupèrent en un syndicat unique pour défendre leurs droits, en demandant notamment la promulgation d’un texte régissant leur profession de gens de maison[27].

La deuxième question soulevée par les témoignages des travailleuses concernait la formation professionnelle des femmes. Ce deuxième problème était étroitement lié au premier, car le manque de formation chez la femme travailleuse était utilisé comme prétexte pour justifier des salaires plus bas. Les femmes étaient souvent reléguées à des emplois subalternes, mineurs et mal rémunérés en raison de préjugés selon lesquels les femmes étaient dépourvues de qualifications éducatives et de compétences professionnelles. Selon les syndicalistes, il était nécessaire de libérer la femme de ses tâches ménagères excessivement absorbantes, qui ne lui laissaient pas le temps de se former en dehors de ses heures de travail. Pour cela, les femmes devaient revendiquer le droit et le temps de se former pendant les heures de travail[28].

Le problème du manque de formation concernait presque toutes les travailleuses dans des secteurs variés, même si les travailleuses de la fonction publique semblaient être les plus engagées dans la lutte pour l’éducation et la formation professionnelle. Le 20 décembre 1961, la Fédération nationale des postes, télégraphes et téléphones (P.T.T.) déclenchait une grève « générale et illimitée »[29] dans tous les secteurs des P.T.T. pour protester contre l’augmentation du coût de vie et les bas salaires. Les travailleuses des P.T.T. descendirent également dans la rue pour demander les moyens de se former professionnellement et dénoncer l’impossibilité de concilier des activités différentes, telles que la formation, les concours, les examens et les stages avec le travail domestique, la famille et les enfants[30]. On peut relever les mêmes problèmes dans le domaine de la santé publique, qui connaissait à l’époque des problèmes profonds, liés au personnel et, encore une fois, à la formation et aux bas salaires. Une infirmière « brevetée », ayant suivi une formation de deux ans, gagnait au maximum 38 000 francs par mois. Après sa formation biennale, elle devait signer un contrat qui l’engageait à travailler trois ans pour « rembourser » à l’état la formation qu’elle avait reçue. Seulement après cinq ans de pratique pouvait-elle devenir infirmière diplômée, atteignant le salaire de 47 000 francs par mois. Au début des années 1960, à Casablanca seulement un nombre limité d’infirmières qui allait de 15 à 20 avait la possibilité d’être formées chaque année dans l’Ecole Lalla Aicha. Ce nombre était clairement « dérisoire » car il ne suffisait même pas « à combler tous les départs, ni à plus forte raison à remédier à la pénurie de personnel »[31]. L’absence de personnel et le manque de formation des employés de la santé publique représentaient donc de facto le principal problème pour la femme travailleuse qui, « mal payée, exploitée et submergée de travail »[32], quittait souvent le secteur public pour travailler dans le privé.

La troisième problématique liée aux conditions de vie et de travail des femmes marocaines concernait la création de pouponnières avec des tarifs accessibles à toutes les familles. « Les femmes travailleuses… » écrivaient les femmes de l’U.M.T. « …pour pouvoir assumer leurs fonctions, leur travail, doivent en outre être déchargées de leurs tâches ménagères, par [sic] trop absorbantes, et qui ne leur laissent pas le loisir de s’intégrer à la vie économique et sociale »[33]. La tâche principale et la plus onéreuse en termes de temps et d’énergie était évidemment la garde des enfants, qui empêchait les femmes d’avoir le temps nécessaire pour travailler ou simplement d’exercer leur profession en toute liberté et autonomie. Si certaines travailleuses pouvaient compter sur une aide, comme leur mère vivant chez elles ou des maris au chômage qui pouvaient s’occuper des enfants, d’autres se plaignaient de ne pas pouvoir se permettre une gardienne en raison des salaires dérisoires qu’elles recevaient. Elles revendiquaient alors le droit d’avoir accès à des pouponnières. La situation était encore plus dramatique pour les sardinières de Safi. « La chose la plus terrible qu’il soit donné de voir à Safi… », écrivaient les femmes syndicalistes dans les pages de L’Avant-Garde, « …c’est la situation des enfants des sardinières »[34]. Les enfants des travailleuses étaient interdits d’accès aux ateliers de travail de leurs mères et étaient « parqués » dans des garderies où ils passaient toute leur journée « entassés les uns sur les autres, sans hygiène, parfois sans air, toujours sans la plus élémentaire propreté »[35]. Chaque usine avait sa propre garderie, où même plus de 60 enfants étaient surveillés par une employée payée et chargée de cette tâche. « Le manque d’hygiène… » dénonçaient les syndicalistes, « …fait que la mortalité infantile est excessivement élevée… On voit des enfants de quelques mois, abrutis par la fièvre, d’autres ont les yeux couverts de mouches, d’autres encore ont des plaies purulentes sur les membres »[36]. La situation dramatique liée au surpeuplement et à la mauvaise gestion des garderies désavantageait doublement les femmes, car les employeurs, pour éviter d’aggraver une situation déjà dramatique, préféraient embaucher des femmes sans enfants, privilégiant les jeunes femmes célibataires[37]. Les militantes de l’U.M.T. proposaient aussi des solutions pratiques, en réclamant des pouponnières pour les travailleuses des Safi. À cet égard, L’Avant-Garde écrivait en août 1961 que « ces pouponnières dont la création rapide est impérative doivent être implantées dans différents quartiers de Safi ». En plus, « elles doivent aussi être gratuites… » et « servir à toutes les femmes qui travaillent, femmes de ménage, employées des usines, des textiles […] et non pas seulement aux sardinières »[38].

En mettant l’accent sur un conflit qui était premièrement de nature socio-économique, les syndicalistes n’ont jamais distingué entre les revendications qui visaient une amélioration générale des conditions de travail et les autres luttes qui touchaient au champ politique. Dans ce sens, les femmes avaient pour objectif de soutenir une véritable démocratisation du pays, qui leur permettait de critiquer tout ce qui était ressenti comme un obstacle à l’émancipation des femmes et des masses laborieuses. Cela impliquait des nouvelles formes de participation et d’action collective visant à la construction d’une nouvelle société à l’échelle nationale et à la création de liens de solidarité transnationale avec les pays voisins.

Vers la fin des années 1950, les syndicalistes de l’U.M.T. étaient fortement impliquées dans la création d’alliances syndicales avec les « sœurs d’Algérie » et le mouvement des femmes tunisiennes. Au lendemain de la crise de Bizerte, qui vit une « escalade des tensions franco-tunisiennes »[39] à la suite de la revendication complète de la base militaire de Bizerte par la Tunisie dans l’été de 1961, le syndicat marocain organisa une journée nationale de solidarité avec son pays voisin. Les femmes syndicalistes participèrent activement à l’événement pour exprimer « leur solidarité avec leurs sœurs de Tunisie » en soulignant « que la lutte menée par les femmes tunisiennes pour la libération de leur pays, était leur lutte »[40].

De manière similaire, les syndicalistes de l’U.M.T. étaient en première ligne pour soutenir les femmes algériennes dans leur combat pour l’indépendance. Le soutien inébranlable à la révolution algérienne avait pris de l’ampleur en tant que cause identitaire de premier plan dans le cadre de la défense des pays arabes, africains et tiers-mondistes, s’intégrant dans un vaste réseau de solidarité anticoloniale assuré pas seulement par une coopération étroite entre gouvernements, mais également par des acteurs non étatiques et organisations et mouvements de diverses idéologies et inspirations[41]. Surtout dans les dernières phases de l’occupation française en Algérie, la variété et le nombre d’articles dédiés à la lutte anticoloniale des Algériens a augmenté considérablement dans les colonnes de L’Avant-Garde. Au mois d’octobre 1961, les principales représentantes des ouvrières marocaines se réunissent également à la Bourse du travail à Casablanca, siège officielle de l’U.M.T. depuis mai 1956, pour adopter une motion dénonçant « les odieux traitements perpétrés contre les femmes algériennes »[42] et réclamer la libération d’Ahmed Ben Bella, ainsi que l’ouverture de négociations entre le Gouvernement provisoire de la république algérienne (G.P.R.A.) et le gouvernement français[43]. Il n’était pas rare que L’Avant-Garde publiât des histoires de femmes algériennes actives dans la guerre de libération, comme celle de Jamila Boupacha, femme militante du Front de libération nationale algérien (F.L.N.) et symbole de la lutte anticoloniale arrêtée et torturée à Alger en 1960[44]. Ou, encore, celle de Jamila Bouhired, torturée, condamnée à mort et finalement libérée en 1959[45]. En octobre 1961, L’Avant-Garde écrivait que dans la construction et l’édification d’une Algérie libre et indépendante « les femmes jouent un grand rôle. Dans les prisons, dans les djebels, les villes et les villages […] elles ont pris en mains toutes les activités sociales, établi des contacts avec leurs sœurs de tous les pays du monde »[46]. D’ailleurs, en soutenant aussi les femmes d’Algérie par leur solidarité inconditionnelle, les femmes marocaines se prononcèrent en faveur non seulement de l’indépendance algérienne, mais aussi de la « construction d’un Maghreb uni, juste et démocratique »[47].

Au Maroc, ces mêmes syndicalistes plaident en faveur d’une réforme du code civil et du droit de la famille. Notamment, les femmes de l’U.M.T. réclamaient l’abrogation de la répudiation, garantie par l’article 46 de la moudawana (code du statut personnel) du 1957[48]. Le deuxième livre de la moudawana, « La dissolution du mariage », maintenait en effet toutes les formes reconnues par le droit malikite classique au niveau de répudiation et de divorce, en reconnaissant au mari le droit de rompre unilatéralement le contrat de mariage sans avoir à justifier son acte ni à fournir les motifs de son choix[49]. En regardant à la répudiation comme un véritable obstacle à l’émancipation politique et sociale de la femme, les syndicalistes la considéraient « humainement néfaste » et, encore, « une négation flagrante et inadmissible des droits de la personne humaine, en même temps qu’une mesure destinée à réduire l’importance de la femme dans la nation »[50].

Monté sur le trône en 1961, Hassan II entama un nouveau projet de constitution « taillée à sa mesure »[51] qui ouvrait la voie à un important degré d’ingérence du roi dans le gouvernement en renforçant son pouvoir exécutif et législatif[52]. L’annonce d’un référendum constitutionnel fixé au 7 décembre 1962 déclencha au Maroc une vague de protestations de la part des oppositions politiques et de l’U.M.T., qui mirent en place une véritable campagne de boycottage. Les femmes syndicalistes menèrent également une longue campagne de contestation du projet de constitution, condamnant fermement « les nouvelles tentatives de mystification du pouvoir » et appelant toutes les femmes et toutes les citoyennes du Maroc « à prendre conscience » et à « entrer de toutes leurs forces dans ce combat, aux côtés de toute la classe ouvrière et de toutes les forces progressistes »[53]. Elles considéraient la constitution octroyée comme un moyen déloyal pour « légaliser et renforcer le pouvoir absolu »[54], qui négligeait les principes animant la lutte populaire, les revendications des femmes et les aspirations des masses travailleuses. Ainsi, les représentantes des femmes au sein de l’U.M.T., réunies en session extraordinaire le 22 novembre à Casablanca, adoptèrent une résolution condamnant le texte constitutionnel, qui visait à « renforcer des structures féodales », en soulignant que « les femmes, partie intégrante du peuple marocain qui ont toujours mené la lutte pour la démocratie, ne peuvent admettre une telle atteinte aux droits du peuple » [55].

Vers la création de l’Union progressiste des femme marocaines

Les défis engendrés par le développement social et économique auxquels le nouvel état indépendant était confronté avaient contribué à l’émergence d’une nouvelle génération de femmes travailleuses, politisées et syndicalisées, dont la voix et la visibilité étaient encore fortement stigmatisées. Trop souvent reléguées au rôle de femme au foyer, les travailleuses marocaines étaient représentées presque exclusivement par des hommes, tant au niveau des partis politiques que des organisations syndicales. Mais ayant « pris conscience du rôle déterminant qui est leur »[56] et hautement motivées par l’expansion fulgurante de l’action syndicale, les femmes syndicalistes jugeront bientôt nécessaire de s’organiser et de se mobiliser autour d’une nouvelle organisation, étroitement liée à l’U.M.T. mais entièrement féminine tant au niveau de sa direction que de la base.

Née de la volonté des femmes qui militaient dans les rangs de l’U.M.T., l’U.P.F.M. fut créée le 22 avril 1962 dans la salle des fêtes de Casablanca. Le premier congrès constitutif de l’U.P.F.M. visait à créer une nouvelle organisation, ou branche syndicale, pour faciliter l’engagement des femmes « dans la lutte générale » du peuple marocain, ainsi que pour « la réalisation de leurs aspirations propres en tant que femmes »[57]. Avec une participation très ouverte sollicitée par les dirigeants syndicaux, le congrès fut inauguré en présence de plusieurs déléguées des principales villes du pays représentant les unions locales de Rabat, de Kénitra, de Marrakech, de Safi, de Meknès et de Beni Mellal, à côté des déléguées des fédérations des syndicats uniques et des représentants des quartiers de Casablanca. Au congrès avaient également participé une déléguée des Algériennes de Casablanca, une représentante de l’ambassade de Guinée à Rabat, le représentant de la Conférence des organisations nationalistes des colonies portugaises (CONCP) au Maroc ainsi que d’autres invités venant aussi bien de pays africains et arabes que de pays européens et américains[58].

En particulier, le congrès fut inauguré par Amina Amor, membre de la commission administrative de l’U.M.T. et secrétaire générale du syndicat des femmes de ménage. Juste après elle, prirent la parole Mohammed Tibary, membre du secrétariat national de l’U.M.T., directeur de L’Avant-Garde et secrétaire de l’union locale des syndicats de Casablanca, et même Mahjoub Ben Seddik, fondateur et secrétaire général et de l’U.M.T. depuis 1955[59]. Zhor El Ouriachi, membre du bureau de la Fédération des travaux publics de Rabat, prit ensuite la parole pour présenter le rapport d’orientation de l’U.P.F.M. El Ouriachi expliqua la genèse de ce large groupe de femmes marocaines, en dévoilant le projet d’une organisation qui n’était pas « destinée à grouper seulement les travailleuses », mais « toutes les femmes », puisque les « objectifs », les « aspirations » et le combat « de toutes les femmes, travailleuses chez elles, ou travailleuses à l’extérieur sont les mêmes »[60]. Plusieurs syndicalistes de Rabat, Casablanca, Meknès et Beni Mellal prirent également la parole pour expliquer leurs conditions de vie et de travail et pour parler de leurs luttes, de leurs objectifs et de leurs aspirations. Dans un climat bienveillant et enthousiaste, le congrès continua ensuite avec la rédaction et l’adoption de trois résolutions concernant l’« identité des objectifs politiques de l’U.P.F.M. », la « promotion de la femme dans tous les domaines » et « la solidarité avec les sœurs de tous les pays » auxquelles fut rajouté un « appel à toutes les femmes du Maroc » invitant toutes les marocaines à « intensifier leur participation au combat éclatant mené par les masses populaires »[61]. Ensuite, le congrès fut clôturé par l’élection des membres de la commission administrative de l’U.P.F.M. pour les villes de Casablanca, Rabat, Marrakech, Kenitra, Ben Mellal, Safi et Meknès. Amina Amor et Zhor El Ouriachi furent respectivement désignées secrétaire de l’organisation et trésorière. À l’issue de ces élections, le congrès prit fin dans l’euphorie et la joie générale, mais aussi et surtout en pleine conscience qu’un nouveau chapitre dans l’histoire du mouvement féminin marocain allait enfin commencer[62].

Image n. 1. Vues du Congrès constitutif de l’U.P.F.M. (Source: L’Avant-Garde, 21 avril 1962).

Le congrès de l’U.P.F.M. se présenta comme une étape fondamentale, par son ampleur et ses objectifs, dans un plus large processus de questionnement et de recomposition des rapports de genre au Maroc. En développant une réflexion critique des conditions économiques et sociales de la femme marocaine, l’U.P.F.M. vit depuis le début un véritable engagement politique tant au niveau national qu’au niveau international. Après avoir ouvert des sections régionales dans toutes les principales villes du Maroc[63], les membres de l’U.N.P.F. prirent part aux manifestations du 1 mai et participèrent également au deuxième congrès national de l’U.N.F.P., au cours duquel Amina Amor et Zhor El Ouriachi furent élues membres du conseil national du parti[64]. L’U.P.F.M. développa aussi des rapports et des liens d’amitié avec des organisations féminines internationales, en particulier avec l’Union nationale des femmes tunisiennes et avec les organisations féminines algériennes, avec lesquelles elles organisèrent, le 26 décembre 1962, le premier congrès de la Ligue des femmes du grand Maghreb, visant à créer un front unitaire féminin dans le Maghreb arabe et à renforcer l’alliance entre les travailleuses du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie[65].

Mais bien que l’idée d’un organisme féminin annexé à l’U.M.T. fût encouragée et supportée par les femmes de la centrale, la formation de l’U.P.F.M. n’est pas réductible à la seule initiative des femmes syndicalistes, et elle doit être considérée aussi dans l’histoire plus large de l’U.M.T. en tant qu’expression d’une précise stratégie syndicale du bureau national de la centrale. À partir de 1961, le gouvernement marocain, présidé par le roi Hassan II, ouvra une phase de répression sanglante contre les forces de la gauche qui furent frappées et marginalisées du champ politique[66]. Tout en semant la division au sein des oppositions politiques, le pouvoir limitait la marge d’action syndicale, en le détachant de toute action politique et, spécialement, de l’U.N.F.P. et de ses militants. S’inscrivait ainsi dans une phase de crise et décadence de l’action de l’U.M.T., la formation de l’U.P.F.M. peut être considérée comme l’expression d’une « stratégie offensive » de la centrale syndicale qui visait à renforcer des « organisations de mobilisation », notamment l’U.P.F.M. et la Jeunesse ouvrière marocaine (J.O.M.), section jeunesse de l’U.M.T. crée en 1957, pour compenser le retrait de l’action syndicale de la vie politique en établissant des contacts avec les catégories non ouvrières ou moins représentées[67]. Néanmoins, Abdeltif Menouni donna un jugement plutôt dur sur l’impact réel de l’U.P.F.M. et de la J.O.M., en les définissant « faibles et sans efficacité réelle » et lui juste reconnaissant « le mérite d’exister »[68].

Mais si dans le champ syndical et politique l’impact effectif de l’U.P.F.M., et plus en général de l’U.M.T., fut limité par la répression croissante des décennies suivantes, la participation des femmes au sein des masses ouvrières et syndicales représentait une étape importante de l’histoire féminine au Maroc. En manifestant leur volonté de guider des femmes partageant des revendications communes face au pouvoir politique, les syndicalistes de l’U.P.F.M. ont ouvert la voie à une nouvelle phase du militantisme féminin au Maroc qui a amené à la naissance de mouvements féminins et d’organisations pour la défense des droits des femmes de plus en plus structurées. Par ailleurs, la participation des femmes au sein de l’U.P.F.M. témoigne des efforts des femmes marocaines à donner une interprétation unique de leur expérience qui différait souvent de celle des hommes. Comme souligné par Fatima Sadiqi, cette prise de conscience fut le fondement des luttes pour la promotion d’un accès majeur des femmes dans le monde du travail[69]. De nouvelles pistes de recherche devront accorder une plus grande attention à la convergence entre le mouvement des femmes travailleuses, les mouvements pour les droits humains et pour la démocratisation, ainsi que les mouvements politiques de gauche et, plus en général, d’opposition et de résistance politiques. De même, la centralité de la question du travail et des opportunités économiques égales joua un rôle crucial dans la naissance des premiers mouvements féministes qui remettaient en question un état et un ordre social fortement basés sur des relations de pouvoir patriarcales. Malgré l’expérience violente des « années de plomb », les décennies suivant la fondation de l’U.P.F.M. ont conduit à de nouvelles formes, expériences et voies revendicatrices du militantisme politique féminin, surtout à gauche et à l’extrême gauche, avec la femme marocaine qui était à l’avant-garde de la lutte pour la démocratie et la liberté.

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[1] Albert Ayache, Le mouvement syndical au Maroc. Tome 1 (191-1942), Paris, L’Harmattan, 1982, pp. 58-78.

[2] Mounia Bennani-Chraïbi, Partis politiques et protestations au Maroc (1934-2020), Renne, Presses universitaires de Rennes, 2021, p. 77.

[3] Mostafa Bouaziz, Aux origines de la koutla démocratique, Casablanca, Éditions de la Faculté des lettres Aïn-Chock, 1997, p. 93.

[4] John Waterbury, The Commander of the Faithful: The Moroccan Political Elite – A Study in Segmented Politics, New York, Columbia University Press, 1970; Maâti Monjib, La monarchie marocaine et la lutte pour le pouvoir. Hassan II face à l’opposition nationale, Paris, L’Harmattan, 1992.

[5] Mustapha Kraiem, Nationalisme et syndicalisme en Tunisie, 1918-1929, Tunis, UGTT, 1976; Abdesselem Ben Hamida, Capitalisme et syndicalisme en Tunisie 1924-1956, Tunis, Université de Tunis, 2003; Bechir Tlili, Nationalismes, socialisme et syndicalisme dans le Maghreb des années 1919-1934, Tunis, Université de Tunis, 1984.

[6] Hèla Yousfi, Trade Unions and Arab Revolutions. The Tunisian Case of UGTT, New York, Routledge, 2018; Najet Mizouni, « L’UGTT, moteur de la revolution tunisienne » Tumultes 1, 2012, pp. 71-91; Mohamed-Salah Omri, « No Ordinary Union: UGTT and the Tunisian Path to Revolution and Transition » Workers of the World: International Journal on Strikes and Social Conflict 1, 2015, pp. 14-29.

[7] Ayache, op. cit.; Albert Ayache, Le mouvement syndical au Maroc. Tome 2: La marocanisation (1943-1948), Paris, L’Harmattan, 1990; Albert Ayache, Le mouvement syndical au Maroc. Tome 3: Vers l’indépendance (1949-1956), Paris, L’Harmattan,1993; Fouad Benseddik, Syndicalisme et politique au Maroc, t. 1, 1930-1956, Paris, L’Harmattan, 1990.

[8] La seule exception significative réside dans l’œuvre: Abdeltif Menouni, Le syndicalisme ouvrier au Maroc, Casablanca, Éditions Maghrébines, 1979.

[9] Ibrahim Ait Izi, al-Hirak al-ijtimaʿi fi maghrib ma baʿd al-istiqlal (1956-1975), Doha, al-Markaz al-ʿarabi li-l-abhath wa dirasa al-siyyasat, 2024, pp. 341-342.

[10] Fatima Sadiqi, « Facing Challenges and Pioneering Feminist and Gender Studies: Women in Post-colonial and Today’s Maghrib » African and Asian Studies 7, 2008, pp. 456-457; Loubna Amari, « al-Shabat al-maghribiyya zaman al-himaya al-faransiyya bayna masharaka wa-l-intiqad », Muhammad al-Karadi (ed.) Shadarat min tarikh al-Maghrib: al-majal, wa-l-mujtamaʿ wa-l-turath, Kenitra, Dar al-Qarawiyyin, 2020,  pp. 201-233; Assia Benadada, « Les femmes dans le mouvement nationaliste marocain » Clio. Femmes, Genre, Histoire 9, 1999, en ligne http://journals.openedition.org/clio/1523.

[11] Martina Biondi, « Gli anni di piombo in Marocco. Attivismo femminile, sinistra e memoria (1965-2005) », Thèse de doctorat, Université de Pérouse, 2023.

[12] Arbia Selmi, « Les mobilisations des femmes syndicalistes pour l’égalité en Tunisie postrévolutionnaire: le cas de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) », Thèse de doctorat, Paris, EHESS, 2022.

[13] La collection complète de la revue, en français et en arabe, a été récupérée entièrement dans les archives de l’U.M.T. à Casablanca.

[14] « À l’aube de 1962 les travailleuses réaffirment leur volonté de lutter pour les objectifs de toute la classe ouvrière et pour leurs objectifs propres », Avant-Garde, 30 décembre 1961.

[15] Rahma Bourqia, « Genre et emploi dans l’industrie textile marocaine », Genève, UNRISD, 1999.

[16] « Dawr al-marʾa fi al-kifah al-watani al-maslih », al-Taliʿa, 22 juin 1956.

[17] « Pourquoi une page de la femme », L’Avant-Garde, 27 juin 1961; « Leurs problèmes », L’Avant-Garde, 27 juin 1961.

[18] « À l’aube de 1962 les travailleuses réaffirment leur volonté de lutter pour les objectifs de toute la classe ouvrière et pour leurs objectifs propres », Avant-Garde, 30 décembre 1961.

[19] Ibidem.

[20] Dans cette période, la question de la pauvreté se consolida comme une préoccupation à caractère national, en devenant aussi l’objet de plusieurs enquêtes consacrées aux masses des pauvres. Ces études, souvent conçues comme un « outil de gouvernement » au « fondement de politiques sociales » de l’état, visaient à créer une connaissance nationale des conditions de vie économique des populations locales. Antoine Perrier, « Décrire la pauvreté au Maghreb, des enquêtes de la période coloniale à la sociologie de l’indépendance (années 1930-1970) » Le mouvement social 283, 2023, p. 49.

[21] Abdelkader Berrada « La politique de bas salaires au Maroc: ébauche d’analyse », Bulletin Social et Economique du Maroc, 1986, p. 18.

[22] Idem, p. 22.

[23] Fatima Mernissi, « Le prolétariat féminin au Maroc » L’Année du Maghreb 24, 1980, p. 355.

[24] « Les travailleuses des primeurs sont honteusement exploitées », Avant-Garde, 24 juin 1961.

[25] « Avec les ouvrières de Safi: leurs souffrances et leurs luttes », Avant-Garde, 22 juillet 1961; « Avec les ouvrières de Safi: leurs conditions de vie et de travail », Avant-Garde, 29 juillet 1961.

[26] « Depuis 1955 les femmes de ménage attendent un texte règlementât leur profession », L’Avant-Garde, 1 juillet 1961.

[27] « Depuis 1955 les femmes de ménage attendent un texte règlementât leur profession », L’Avant-Garde, 1 juillet 1961.

[28] « À l’aube de 1962 les travailleuses réaffirment leur volonté de lutter pour les objectifs de toute la classe ouvrière et pour leurs objectifs propres », L’Avant-Garde, 30 décembre 1961.

[29] « Grève des P.T.T. le 20 Décembre », L’Avant-Garde, 25 novembre 1961.

[30] « Avec les postières pendant la grève », L’Avant-Garde, 23 décembre 1961.

[31] « S.O.S. santé publique: les infirmières exposent leurs problèmes », L’Avant-Garde, 19 août 1961.

[32] « S.O.S. santé publique: la formation professionnelle ? Un replâtrage », L’Avant-Garde, 26 août 1961.

[33] « À l’aube de 1962 les travailleuses réaffirment leur volonté de lutter pour les objectifs de toute la classe ouvrière et pour leurs objectifs propres », Avant-Garde, 30 décembre 1961.

[34] « Aves les ouvrières de Safi: la situation de leurs enfants », L’Avant-Garde, 5 août 1961.

[35] Ibidem.

[36] Ibidem.

[37] « À l’aube de 1962 les travailleuses réaffirment leur volonté de lutter pour les objectifs de toute la classe ouvrière et pour leurs objectifs propres », L’Avant-Garde, 30 décembre 1961.

[38] « Aves les ouvrières de Safi: la situation de leurs enfants », L’Avant-Garde, 5 août 1961.

[39] Samya El Machat, « La crise de Bizerte 1960-1962 » Revue française d’histoire d’outre-mer 87:328-329, 2000, pp. 299-326.

[40] « Les femmes marocaines appuient la lutte de leurs sœurs Tunisiennes et Algériennes », L’Avant-Garde, 26 août 1961.

[41] Katharine McGregor et Vanesse Hearman, « Challenging the Lifeline of Imperialism: Reassessing Afro-Asian Solidarity and Related Activism in the Decade 1955-1965 », Eslava L., Fakhri M. et Nesiah V. (ed.) Global History and International Law Critical Pasts and Pending Futures, Cambridge, Cambridge University Press, 2017, pp. 161-176; Reem Abou-El-Fadl, « Building Egypt’s Afro-Asian Hub: Infrastructures of Solidarity and the 1957 Cairo Conference » Journal of World History 30:1, 2019, pp. 157-192.

[42] « Les travailleuses marocaines appuient leurs sœurs algériennes », L’Avant-Garde, 28 octobre 1961.

[43] Ibidem.

[44] « L’histoire de Jamila », L’Avant-Garde, 18 novembre 1961.

[45] « Al moudjahidat », L’Avant-Garde, 28 Octobre 1961.

[46] Ibidem.

[47] « Les travailleuses marocaines appuient leurs sœurs algériennes », L’Avant-Garde, 28 octobre 1961.

[48]  Fatima Sadiqi, « The Central Role of the Family Law in the Moroccan Feminist Movement », Zahia Smail Salhi (ed.) Gender and Diversity in the Middle East and North Africa, New York, Routledge, 2010, pp. 33-46.

[49] Salime Zakia, « Revisiting the Debate on Family Law in Morocco. Context, Acors, and Discourses », Kenneth M. Cuno and Manisha Desai (eds.) Familiy, Gender, and Law in a Globalizing Middle East and South Asia, Syracuse, Syracuse University Press, 2009, pp. 145-162.

[50] « La répudiation doit être abrogée au Maroc », L’Avant-Garde, 23 septembre 1961.

[51] Myriam Catusse, « Au-delà de l’opposition à sa Majesté. Mobilisation, contestations et conflits politiques au Maroc » Pouvoirs 2, 2013, pp. 31-46.

[52] Lise Storm, Democratization in Morocco. The Political Elite and Struggles for Power in the Post-independence State, New York, Routledge, 2007, p. 20.

[53] « Les femmes du Maroc protestent contre les nouvelles tentatives de mystification », L’Avant-Garde, 24 novembre 1962.

[54] « Pourquoi nous la condamnons », L’Avant-Garde, 1 décembre 1962.

[55] « Notre réponse à la mystification », L’Avant-Garde, 24 novembre 1962; « Pourquoi nous la condamnons », L’Avant-Garde, 1 décembre 1962.

[56] Union marocaine du travail, « L’Union progressiste des femmes marocaines: unité, force, enthousiasme », Casablanca, Imprigema, 1962, p. 3.

[57] « Le 22 Avril à Casablanca: les femmes du Maroc franchiront une nouvelle étape de leur lutte », L’Avant-Garde, 21 avril 1962.

[58] Union marocaine du travail, « L’Union progressiste des femmes marocaines: unité, force, enthousiasme », Casablanca, Imprigema, 1962, pp. 5-6.

[59] Originaire de Meknès, Ben Seddik fut cheminot et militant nationaliste dans l’aile gauche de l’Istiqlal et, après la scission du parti, de l’U.N.F.P. Majeur représentant du mouvement syndical au Maroc, en 1961 il fut aussi élu président de l’Union syndicale panafricaine (U.S.P.A.), dont le congrès fondateur fut tenu à Casablanca. Menouni, op. cit., p. 457.

[60] Union marocaine du travail, « L’Union progressiste des femmes marocaines: unité, force, enthousiasme », Casablanca, Imprigema, 1962, p. 20.

[61] Idem, p. 24.

[62] Union marocaine du travail, « L’Union progressiste des femmes marocaines: unité, force, enthousiasme », Casablanca, Imprigema, 1962, pp. 10-11.

[63] Idem, p. 31.

[64] « La participation de l’UPFM au congrès de l’UNFP: un incontestable succès », Avant-Garde, 2 juin 1962.

[65] « L’U.P.F.M. à Tunis : pour la première réunion de la ligue des femmes du grand Maghreb », Avant-Garde, 30 juin 1962; « Collaboration accrue entre l’U.N.F.T. et l’U.P.F.M. décision prise de tenir en décembre 1962 le 1er congrès de la ligue des femmes du grand Maghreb », Avant-Garde, 21 avril 1962.

[66] Susan Miller, A History of Modern Morocco, New York, Cambridge University Press, 2013, pp. 166-167.

[67] Menouni, op. cit., p. 179.

[68] Menouni, op. cit., p. 177.

[69] Sadiqi, op. cit., p. 459.